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Crise financière et récession : "C'est plutôt le Coran qu'il faut re-lire..."

Publié le par Stephe



Distinguer l’abattage rituel quotidien de celui de l’aïd al-kebir est nécessaire



Consacrant son éditorial du 11 septembre dernier, “Le pape ou le Coran”, à la crise financière qui ébranle le monde et à la venue du pape Benoît XVI en France, Vincent Beaufils surprend. Revenant sur l’ouvrage d’André Comte-Sponville sur la morale et le capitalisme (Le capitalisme est-il moral ?), l’éditorialiste congédie le pape et les textes pontificaux… pour inviter à lire le Coran. “C’est plutôt le Coran qu’il faut relire”, écrit-il. “Car si nos banquiers, avides de rentabilité sur fonds propres, avaient respecté un tant soit peu la charia, nous n’en serions pas là.”

Mieux, il rappelle l’actualité fracassante d’une conception très moderne de l’économie, celle de la finance islamique. Il suffit selon lui de voir comment les pays du Golfe ont “épousé” avec succès le XXIe siècle. Leur recette miracle : la règle islamique qui veut qu’on ne fasse pas de l’argent avec de l’argent. L’islam proscrit en effet très sévèrement toute transaction basée sur l’intérêt et l’usure (rîba). Rien ne justifie le recours à rîba pas même l’émission d’une fatwa fantaisiste permettant le recours au crédit immobilier qui fait fureur chez les classes moyennes en France. La sacralité de ce principe est tel qu’en islam rîba fait partie des grands péchés, puisqu’elle est ni plus ni moins une abomination. Abomination qui fait sentir tous ses effets depuis plusieurs mois, notamment aux États-Unis ou des millions de pauvres gens, des familles entières, se sont retrouvés du jour au lendemain sur le trottoir, SDF. Comme le relève d’ailleurs Vincent Beaufils lorsqu’il précise que “si les banques du Golfe sont sorties indemnes de la crise du subprimes, c’est qu’elles n’y sont pas entrées”.

Et d’appuyer là où ça fait mal : “le respect de ce principe du Coran est également fort utile dans la relation que chacun entretient avec l’argent, qu’il s’agisse des entreprises ou des particuliers : les personnes morales n’ont ainsi pas le droit de s’endetter au-delà de leur capitalisation boursière ; quant aux personnes physiques, elles ne peuvent de facto souffrir de surendettement”. Pour finir sur un jugement sans appel : “même si [ces règles] reposent sur un texte qui date du VIIe siècle, Benoît XVI aura du mal à faire des sermons davantage puisés dans l’actualité”.

Surprenant non ?

Pour lire l’édito de Vincent Beaufils, c'est ici :

Le pape ou le Coran

 

André Comte-Sponville, philosophe, nous l'a redit à satiété : le capitalisme ne peut pas être moral, ni contre la morale. Il est tout simplement amoral. L'économie et la morale relevant, au sens pascalien, de deux ordres différents, tenter de conjuguer les deux ensemble relève du «barbarisme», rappelle l'auteur de l'excellent essai Le capitalisme est-il moral ? (éditions Albin Michel). Mais même pour ceux qui ne croient pas à l'ordre divin, quelle tentation, au moment où le pape est en visite en France, de chercher quelques repères sur l'économie dans les textes du Vatican.
Notre chroniqueur Robert Rochefort, qui cache derrière ses fonctions de directeur du Crédoc un attachement à la tradition des chrétiens sociaux, n'a pourtant rien trouvé de très récent en provenance de Rome (lire page 61). Rien en tout cas de très important depuis 1991, quand Jean-Paul II s'était essayé à l'économie dans son encyclique Centesimus annus, et qu'il y avait donné une justification du profit du bout de la crosse : la pierre angulaire du capitalisme y était reconnue tout au plus «comme un bon indicateur du fonctionnement de l'entreprise».
En réalité, et Benoît XVI nous pardonnera, au moment où nous traversons une crise financière qui balaie tous les indices de croissance sur son passage, c'est plutôt le Coran qu'il faut relire que les textes pontificaux. Car si nos banquiers, avides de rentabilité sur fonds propres, avaient respecté un tant soit peu la charia, nous n'en serions pas là. Il ne faut pourtant pas voir la finance islamique comme un exercice de troc moyenâgeux, car les pays du Golfe nous ont montré combien leur mentalité entrepreneuriale savait épouser le XXIe siècle. Simplement, leurs banquiers ne transigent pas sur un principe sacré : l'argent ne doit pas produire de l'argent. La traduction de cet engagement est simple : tout crédit doit avoir en face un actif bien identifié. Interdits, les produits toxiques; oubliés, les ABS et CDO que personne n'est capable de comprendre. Autrement dit, l'argent ne peut être utilisé que pour financer l'économie réelle. Il n'y a donc pas de hasard : si les banques du Golfe sont sorties indemnes de la crise du subprime, c'est qu'elles n'y sont pas entrées. Le respect de ce principe du Coran est également fort utile dans la relation que chacun entretient avec l'argent, qu'il s'agisse des entreprises ou des particuliers : les personnes morales n'ont ainsi pas le droit de s'endetter au-delà de leur capitalisation boursière; quant aux personnes physiques, elles ne peuvent de facto souffrir de surendettement. Voilà des règles qui ne peuvent pas nuire. Et même si elles reposent sur un texte qui date du VIIe siècle, Benoît XVI aura du mal à faire des sermons davantage puisés dans l'actualité.

 

Beaufils Vincent

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